Quels obstacles à l'investissement dans la recherche agroécologique pour l'Afrique ?

Étude/Synthèse/Article
Langue(s) : Anglais Français
Thématiques : Agriculture durable

Le Groupe international d'experts sur les systèmes alimentaires durables (IPES-Food) met en lumière ce que les bailleurs de fonds du développement agricole soutiennent et pourquoi. L'argent investi dans la recherche sur l'agroécologie reste minime alors même qu'elle est un facteur-clef dans la lutte contre la faim et face au défi climatique, particulièrement pour l'Afrique.

Partout dans le monde, des fermes, des communautés, des régions se lancent dans des transitions agroécologiques avec des résultats impressionnants à la clef. Il est essentiel d'approfondir et diffuser les connaissances sur l'agroécologie pour pérenniser ses progrès et les amplifier. 

Pourtant seuls quelques bailleurs de fonds - dont la France, la Suisse, l'Allemagne, l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et le Fonds international de développement agricole (Fida) - ont explicitement reconnu l'agroécologie comme solution clef pour bâtir des systèmes alimentaires durables. 

Les projets de 3 bailleurs emblématiques ont été passés en revue par les auteurs :

  • La Suisse, grand donateur bilatéral : 51 % des projets de recherche agricole avaient des composantes agroécologiques. Toutefois, l'agroécologie était trop souvent réduite à sa dimension biophysique. Les approches vraiment systémiques étaient l'exception. 
  • La Fondation Bill et Melinda Gates (BMGF), le plus grand investisseur ayant une vocation philanthropique : 85 % des projets financés se cantonnaient à l'agriculture industrielle. 10 % portaient sur des éléments socio-économiques ou politiques du changement mais ne comprenaient aucun aspect lié à l'agroécologie. 3 % étaient agroécologiques, c'est-à-dire qu'ils comprenaient des éléments de restructuration des écosystèmes agricoles. 
  • le Kenya, l'un des principaux bénéficiaire et exécutant de la recherche agricole pour le développement : 70 % des projets se cantonnaient à l'agriculture industrielle. Un institut kenyan, le National Research Fund, mettait l'accent sur l'agroécologie dans près du quart de ses projets mais aucun ne combinait transformation des agroécosystèmes et transformation des conditions socioéconomiques/politiques.

Les obstacles à la recherche agroécologique sont profondément enracinés mais pas insurmontables. La majorité des bailleurs de fond approuvent certains principes de l'agroécologie tout en continuant à soutenir les approches conventionnelles. Pourquoi ?

Les préoccupations quant à la rentabilité à court terme des projets agroécologiques reviennent fréquemment. Le cadre (échéances de financement, possibilités de carrière, spécialisation institutionnelle) continue à favoriser les approches conventionnelles. Trop souvent, l’agroécologie est réduite à sa dimension biophysique. Par conséquent, des donateurs comme la Suisse prêtent moins d’attention à des éléments comme l’économie circulaire, les réseaux alimentaires locaux, les cultures alimentaires et la co-création de connaissances avec les agriculteurs et les communautés locales*.

Cependant, les possibilités de changement sont considérables. Les priorités peuvent changer rapidement, tout particulièrement dans les organisations très hiérarchiques comme la Fondation Gates. Porter les preuves à l'attention des donateurs la résilience climatique des systèmes agroécologiques est un excellent moyen de les promouvoir.  Télécharger le résumé en français

*Pour favoriser une approche systémique, le programme CFSI-Fondation de France en faveur du consommer local en Afrique de l'Ouest (Pafao) s'est par exemple alliée au programme en faveur de l'agroécologie Joint Action for Farmers' Organiations in West Africa (Jafowa)