Opportunités et risques de l'Accord de Partenariat Economique Côte d'Ivoire-Union Européenne

Étude/Synthèse/Article
Langue(s) : Français
Thématiques : Commerce international

La Côte d'Ivoire et l'Union européenne ont ratifié en 2016 un accord de libre-échange intérimaire (APE intérimaire pour Accord de partenariat économique) du fait du blocage des négociations entre l'UE et la région Afrique de l'Ouest dans son ensemble (en particulier refus du Nigéria).

Cette étude du Gret menée entre février et octobre 2020 prévoit les conséquences de cette ouverture, des données fondamentales pour que la société civile ivoirienne puisse alerter le gouvernement des risques pour les populations les plus fragiles. 

L’accord de Cotonou entre l’UE et les pays ACP, signé en l’an 2000, prévoyait la mise en place d’APE régionaux au plus tard fin 2007, dont l’APE avec la région ouest-africaine, c’est-à-dire l’ensemble des pays de la Cedeao plus la Mauritanie. En contrepartie du maintien du libre accès au marché européen pour les produits des pays ACP (libre-accès issu des Conventions de Lomé), les régions ACP s’engageaient à libéraliser progressivement une part substantielle de leurs marchés au profit des produits européens.

Etant donné les blocages, l'UE a engagé en 2008 des négociations bilatérales avec certains Etats, dont le Côte d'Ivoire, en vue de signer des APE dit intérimaires, pays par pays, censés être remplacés in fine par un accord régional. Ratifié en 2016, annoncé effectif en 2019, l'APE Côte d'Ivoire UE ne s'est toujours pas concrétisé en réalité à fin 2020.

La réduction et élimination des droits de douane appliqués sur les produits européens entrant en Côte d'Ivoire est le principal changement. Certains produits sensibles (environ 19% des volumes entrant depuis l'UE) sont exclus de la libéralisation pour le moment.

Quels sont les risques ?

Aucune information sur les secteurs qui bénéficieront d'un soutien

Une "stratégie nationale APE" doit soutenir certains secteurs économiques mais on ne sait pas si les secteurs de l'économie populaire (agriculture familiale, petites et moyennes entreprises) en bénéficieront.

Concurrence accrue

Cette concurrence accrue par les produits originaires de l'UE peut se traduire par une baisse des prix des produits locaux soumis à concurrence et par une fragilisation des secteurs productifs nationaux. Les filières de transformation des céréales, racines, tubercules, légumes, fruits, produits de l'élevage, produits de la pêche, huile de palme, semences, canne à sucre, alcool ont ainsi été identifiées comme à risque. A plus long terme, les évolutions des habitudes alimentaires défavorables à la production locale crée une dépendance alimentaire accrue et met à mal la sécurité alimentaire nationale.

Dépendance accrue des exportations ivoiriennes au marché européen

La fermeture des frontières en 2020 a montré comment cela pouvait mettre à mal

Baisse des recettes de l'Etat (de 5 à 6%)

Il y a un risque que cela se traduise par une réduction de certaines dépenses sociales.

Fragilisation du processus d'intégration régionale

Les pays voisins pourraient prendre des mesures contre les importations ivoiriennes alors qu'il existe des forts enjeux à faciliter la circulation des biens au sein de la sous-région.

Recommandations

Avec l'appui du gouvernement et du secteur des PME, le travail d'identification des secteurs industriels hors agro-alimentaires susceptibles d'être fragilisés par les importations européennes devrait être approfondi.

Après la crise sanitaire de 2020, nombre de pays vont chercher à moins dépendre de leurs approvisionnements sur le marché mondial et /ou à limiter leurs exportations.

La société civile ivoirienne devrait demander une transparence du gouvernement vis-à-vis plus globalement des relations commerciales avec les autres régions du monde. En effet, pour bons nombres de secteurs de l'économie ivoirienne, la concurrence provient des pays émergents d'Afrique, d'Asie, du Brésil, de la Turquie, etc. plutôt que de l'UE.

Sur le même sujet, voir l'intervention du co-auteur du rapport Laurent Levard (Gret) en décembre 2020