Systèmes alimentaires durables : la relocalisation alimentaire en débat

Étude/Synthèse/Article
Langue(s) : Français
Thématiques : Agriculture durable

L’apport de cet article de Défis Sud est de penser les conséquences de la relocalisation de l’alimentation de certains pays, dit du Nord, sur l'environnement et les autres pays. A travers des entretiens avec divers experts les modalités de la relocalisation sont mises en perspective.

Une relocalisation en pratique limitée

Dans la réalité, nos capacités de production sont limitées : une zone périurbaine ne peut suffire à nourrir une grande ville par exemple, certaines cultures comme les céréales nécessitent de grandes surfaces. La “souveraineté alimentaire” ne peut donc pas se penser à très petite échelle. 

Au-delà de la relocalisation, la diversification semble être davantage nécessaire. Sortir de l'hyper spécialisation actuelle des territoires permettrait une meilleure résilience alimentaire. 

Nicolas Bricas - agro-économiste au Cirad - résume la complexité des enjeux auxquels doit répondre la relocalisation : l’objectif est de trouver un compromis entre besoin écologique de diversification, la plus petite échelle possible et les intérêts économiques (c’est à dire garder des prix abordables et justement rémunérateurs).

Percevoir la relocalisation comme un levier de durabilité

Les émissions de gaz à effet de serre engendrées par l’alimentation sont majoritairement imputables aux modes de productions (environ ⅔) et dans une moindre mesure au transport ( environ ⅓). 

Le local n'est pas synonyme de durable (exemple des serres chauffées). Tenir compte du mode de production est inévitable dans l’établissement d’un modèle alimentaire durable. Cette variable ne peut être mise de côté lors du processus de relocalisation. 

 Quid du Sud ?

La recherche de souveraineté et de résilience face aux crises potentielles est commune à tous les pays. Le commerce international déséquilibre le système économique alimentaire de nombreux pays du Sud dont la population vit pourtant en grande majorité de l'agriculture. La relocalisation gagnerait à se faire en solidarité avec les mouvements pro-souveraineté alimentaire des autres pays. Manuel Eggen considère qu’il est essentiel de "recentrer ce débat sur le concept global de souveraineté alimentaire (...) Aujourd’hui on voit des acteurs de l’agro-industrie en Belgique utiliser l’argument du repli identitaire pour délégitimer les revendications du mouvement pour la souveraineté alimentaire, en amalgamant les deux notions. Un comble!"

Comme le souligne Laurent Levard - expert en politique commerciale au Gret -, les politiques agricoles du Nord doivent se coupler avec des politiques commerciales cohérentes - tenant compte des droits des paysans et des conditions de travail.