Les producteurs de riz guinéens à l'heure de la reconquête

Étude/Synthèse/Article
Langue(s) : Français
Thématiques : Transformation et filière

En Basse-Guinée, dans la zone côtière, les acteurs de la filière rizicole gagnent des parts de marché grâce à la production d'un riz local haut de gamme.

Photo : Transformatrice de riz en Guinée © Gret

L’accroissement de la population et la part devenue importante du riz dans la consommation des ménages ont depuis plusieurs années décidé le gouvernement guinéen à faire de cette production, pratiquée par 80 % des exploitations, l’axe principal de sa politique de développement agricole. Si la production locale ne couvre toujours pas la totalité des besoins (365 000 tonnes ont été importées en 2013), le riz guinéen a le vent en poupe.

Miser sur la qualité[…]  « Dans la zone de mangrove, le long de la côte, nous avons aménagé 10 000 hectares depuis 1997 », raconte Alpha Oumar Sow, cadre du ministère de l’Agriculture. Sur une partie de la zone, un projet de valorisation du riz local, conduit en partenariat avec le Groupe de recherche et d’échanges technologiques (Gret), le CFSI, la Fondation de France et l’Agence française de développement (AFD), a accompagné 17 unions ou groupements de producteurs et de transformateurs, soit 2 700 agriculteurs et plus de 2 000 étuveuses. « Nous avons travaillé avec la recherche pour sélectionner les semences les plus adaptées afin de produire du riz étuvé très apprécié des consommateurs. Des  conseillers ont également appuyé les petits paysans dans l’appropriation de nouvelles techniques : des digues construites autour des parcelles ont empêché leur invasion par l’eau de mer, qui détruit les cultures. En saison sèche, il faut au contraire laisser l’eau rentrer, car elle élimine les mauvaises herbes, ce qui nous permet de limiter l’utilisation de produits chimiques », poursuit Alpha Oumar Sow. Une charte de qualité a été rédigée et la filière se structure en interprofession pour une meilleure concertation entre agriculteurs, étuveuses, commerçantes, etc.

Concurrencer le riz importéLes résultats ne se sont pas fait attendre : entre le début de l’expérimentation et 2015, les rendements sont passés de 1,3 à 2,5 tonnes à l’hectare. Les acteurs de la filière ont  galement travaillé à la mise en place d’une marque collective pour un riz haut de gamme de mangrove. Ce riz böra maalé (« riz de boue » en soussou) vise une clientèle aisée qui fréquente les restaurants et les supermarchés urbains. […] Le développement de cette marque pourrait permettre d’intégrer dans cette dynamique une trentaine de groupements de producteurs. Les marges dégagées grâce à ce produit haut de gamme pourraient aussi faciliter le lancement d’autres riz étuvés à des prix plus accessibles pour le consommateur guinéen moyen. Et ainsi concurrencer le riz importé, notamment d’Inde, qui surfe sur la préférence des Guinéens pour le riz étuvé en exportant à bas prix. Cette concurrence ne décourage pas Alpha Omar Sow, bien décidé à prendre ses  compétiteurs de vitesse. Le réseau böra maalé réfléchit ainsi à engager une démarche pour obtenir une « indication géographique » (certification protégeant les produits liés à un territoire). Les acteurs de la filière ont aussi gagné en notoriété : le programme alimentaire mondial a en effet acheté aux étuveuses de l’interprofession en janvier dernier 30 000 tonnes de riz destinées essentiellement aux cantines scolaires.

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Article issu du numéro spécial d'Alternatives Economiques "Manger local ou manger mondial", réalisé en partenariat avec le CFSI, dans le cadre de la campagne ALIMENTERRE 2016.