Transformer le manioc pour conquérir les villes

Expertise de terrain
Langue(s) : Français
Filières : Tubercules
Pays : Bénin

Au Sud-Ouest du Bénin, dans le département du Mono, les groupements de femmes transformatrices de manioc du plateau Adja, membres de l’association Mialebouni, cherchent à pénétrer les marchés des villes en proposant des produits améliorés aux consommateurs.

Le  Centre d’intervention pour le développement (Cidev) appuie dix groupements de femmes pour la commercialisation de leurs produits car c’est une étape clé pour l’amélioration de leurs revenus. Rencontre avec Dieu-donné Konnon, le coordonnateur de Cidev. 

La transformation du manioc est-elle une nouvelle activité à Dogbo ?

Les femmes, souvent elles-mêmes productrices, transforment le manioc en gari (pâte de farine) et en tapioca depuis plusieurs années. Il y a dix ans, avec l’impulsion donnée par les projets étatiques de développement de la filière manioc, on en produisait beaucoup plus que maintenant, mais sans l’inscrire dans une approche chaine de valeur. La surproduction de gari ordinaire avait alors fait chuter les prix. Cette situation du marché et la faiblesse des circuits de commercialisation ont provoqué la diminution de la production.

L’accès au marché urbain est-il crucial pour l’activité des femmes de l’association Mialebouni ?

Après une première phase d’amélioration de la production et de la transformation du manioc, elles s’attaquent aujourd’hui à la commercialisation. Elles maîtrisent des techniques de transformation en gari et en tapioca, produits largement consommés, mais également en gari enrichi au lait de coco ou au jus d’ananas. Elles ne valorisaient cependant pas totalement leurs compétences puisque ces denrées enrichies ne rencontrent aucune demande en milieu rural. Or le gari amélioré est plus rentable que les produits classiques qu’elles vendent dans leur village ou en ville via des réseaux de grossistes. L’enjeu était donc de réussir la mise en marché de leurs produits améliorés là où la demande est présente : dans les villes.

Le circuit de distribution via les grossistes ne convient toutefois pas à cette gamme améliorée, plutôt destinée aux boutiques et supermarchés, fréquentés par des consommateurs plus aisés.

Distribution de matériel de transformation © Cidev

Comment s’est déroulée la mise en relation entre transformatrices et distributeurs ?

Il a d’abord fallu une étude de marché pour apprécier la situation dans les villes de Cotonou et Porto-Novo. Elle nous a permis de connaître les magasins prêts à distribuer ces nouveaux produits ainsi que les caractéristiques de la demande.

Ensuite, les responsables de l’association Mialebouni et de chaque groupement ont été formées à la prospection commerciale : utilisation de fiches produits, démarchage, négociation sur les prix… Les distributeurs ayant l’habitude de faire du dépôt-vente, les femmes apportent leurs produits, et c’est quand elles reviennent pour faire un nouveau dépôt qu’elles sont remboursées pour les produits précédemment déposés.

Au départ, le positionnement des produits a posé problème : les magasins ne voulaient que des petites quantités, et les femmes ne jugeaient pas opportuns les voyages pour livrer en ville des commandes aussi peu importantes. Or les supermarchés cotonois et portonoviens veulent se faire livrer directement au niveau des boutiques. La solution a été d’avoir recours à des transporteurs en commun pour acheminer les produits vers les boutiques, une démarche qui est à présent entrée dans les habitudes. La quantité écoulée évolue positivement depuis 2015. 

Produits issus du manioc emballés et étiquetés pour la vente en boutique © Cide

 

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