Les lois semencières qui criminalisent les paysannes et les paysans : résistances et luttes

Étude/Synthèse/Article
Langue(s) : Français
Thématiques : Biodiversité

L’ONG Grain et La Via Campesina dénoncent dans ce livret les lois sur les semences. Paysans et acteurs de la société civile se mobilisent pour préserver leur droit de produire et d’échanger des semences traditionnelles. Ce livret fournit des informations fiables pour favoriser la mobilisation civile.

Les lois semencières transforment les semences paysannes en semences illégales

A elles seules, les 10 plus grosses entreprises semencières possèdent 55 % du marché mondial des semences. Cette concentration, et leur influence croissante sur les législations nationales, inquiète. Ainsi, les accords de commerce et d’investissement leur permettent d’imposer des législations semencières restrictives pour la liberté des paysans d’utiliser leur semence.

Des luttes contre les lois semencières menées aux quatre coins du monde 

-  En Afrique, les semences sont un trésor menacé. Au Ghana, les étudiants et syndicats se mobilisent massivement pour contrer un projet de loi sur les droits d’obtenteurs [i]. La loi actuellement en discussion au parlement ouvre la voie à la bio piraterie. Pour les paysans, garantir la qualité des semences autochtones est primordial, mais cela doit passer par des programmes de sélection publics.

-  Le continent américain concentre les mobilisations sociales les plus dynamiques. Au Mexique, les paysans ont développé des systèmes d’échange de semences de maïs autochtones. 80 % du maïs cultivé au Mexique est issu de semences paysannes. Mais depuis 2005, plusieurs lois menaçaient ces semences et criminalisaient les échanges. Les paysans mexicains se sont mobilisés pour éviter la contamination de leurs semences par les variétés OGM introduites par des programmes gouvernementaux. En portant plainte, une coalition d’organisations paysannes a réussi à mettre fin aux cultures commerciales de maïs OGM.

-  En Asie, la révolution verte a ouvert les portes aux semences industrielles. Mais la lutte s’organise pour contrer une nouvelle vague d’invasion. En Inde, le monde paysan milite contre les semences de coton OGM imposées par des campagnes de pub agressives. Cette mobilisation s’est également opposée à une loi de 2001 qui prévoyait de pénaliser les échanges de semences paysannes. Du fait de la révolution verte, il ne reste plus que 1 % des 200 000 variétés de riz paysan indien.

En Europe, les paysans s’efforcent de sauver la diversité agricole. En France, un réseau de petites entreprises et de paysans produit et diffuse des semences traditionnelles, offrant ainsi une alternative aux semences industrielles.

Tirer les enseignements de ces expériences pour continuer le combat

Les entreprises et les Etats adoptent des stratégies discrètes afin d’éviter les réactions populaires. L’enjeu central est donc d’informer les citoyens du risque d’un holdup des semences :

-  les efforts pour défendre les semences réussissent lorsque des populations diverses (paysans, étudiants, syndicats etc.) se mobilisent. L’union des paysans et des autochtones est essentiel à tout succès de mobilisation ;

-  la défense de la privatisation des semences repose sur des informations erronées et des contre- vérités que l’on doit déconstruire (amélioration de la production, absence de loi de privatisation etc.)

-  le meilleur moyen de défendre les semences est de continuer à les planter et à les partager ;

-  il est essentiel d’endiguer le processus législatif avant l’adoption des lois. Par ailleurs, la plupart des lois votées ne sont pas rédigées par les gouvernements mais par Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (l’OMPI), par des groupes de pression ou par Union pour la Protection des Obtentions Végétales (l’UPOV). Elles ont donc des contenus similaires, rendant les luttes collectives dautant plus efficaces. 

[i] l'obtenteur est celui qui a produit par hasard ou par sélection volontaire une plante stable et distincte. La convention de l'UPOV protège les droits juridiques et commerciaux des obtenteurs sur leur plante pour au moins 20 ans, au détriment de nombreux agriculteurs  

 

Creuser le sujet : 

- Information, Premières victoires aux Nations-Unies : quand les paysans réclament leurs droits, 2014

- Information, Les graines de la faim, 2014  

- Information, dix idées reçues sur les semences paysannes, 2013 

- Film, Les pirates du vivant, 2008 

- Film, Biopiracy , 2002