Augmentation des conflits ruraux au Brésil

Étude/Synthèse/Article
Langue(s) : Français
Thématiques : Agrobusiness

La Commission Pastorale de la Terre (CPT) a rendu public le 7 mai la dernière édition du rapport "Conflitos no Campo Brasil" dans laquelle sont rassemblées chaque année les données concernant les conflits liés à la terre et à l'eau, les violences contre les personnes et le travail esclave. La CPT est la seule organisation à fournir un travail d’une telle ampleur sur la question agraire à une échelle nationale. L'objectif est d'attirer l'attention sur la violence qui se répand en milieu rural et sur la nécessité de résoudre ce problème à travers des actions réclamées depuis des années comme la réforme agraire.

Les espoirs suscités par l'arrivée de Dilma Roussef au pouvoir ne se sont pas concrétisés. Le bilan de la première année de mandat de la présidente est décevant : aucun avancement sur la réforme agraire et un nombre de familles ayant accédé à la terre ("assentadas") le plus bas depuis 1995. Fin mai 2011, le vote à l’assemblée sur la réforme du code forestier a cristallisé les conflits et a été suivi de plusieurs assassinats de travailleurs ruraux dont le couple militant Maria do Espírito Santo et José Cláudio Ribeiro da Silva, devenu aujourd’hui un symbole des violences qui menacent les militants défenseurs de l’environnement.

Des conflits en hausse

En 2011, le rapport relève une augmentation des conflits ruraux et particulièrement des conflits liés à la terre qui sont passés de 835 en 2010 à 1035 en 2011. La particularité des données de 2011 est l'augmentation des différends impliquant des organisations privées (les grands propriétaires terriens, les exploitants forestiers...), responsables de plus de la moitié des conflits liés à la terre. Dans le même temps, l'action des pouvoirs publics est faible, ils ont été impliqués dans moins de 100 conflits en 2011. Ces chiffres sont révélateurs d'un certain laxisme de l'Etat par rapport aux agissements des organisations privés (accaparement de terres au détriment des paysans, expulsion, menaces de morts envers des paysans...).

Moins de morts, plus de menaces

Le nombre d’assassinats a très légèrement baissé. La répercussion internationale qu'ont eu certains assassinats a sans aucun doute joué un rôle. Cependant les menaces de morts ont augmenté de 177% (elles sont passées de 125 en 2010 à 347 en 2011).

Concentration de conflits en Amazonie

L'Amazonie est la zone géographique qui concentre le plus de conflits ruraux. La course aux ressources naturelles telles que les minerais, le bois et la terre s'amplifie. Ainsi, 69% des conflits ruraux, 79,3% des assassinats et 85% des menaces de morts ont lieu en Amazonie.

Le travail esclave progresse

Le travail esclave existe toujours, pire il progresse. Il y a une augmentation du nombre de cas recensés qui passe de 204 à 230 dans 19 Etats. Comme l'affirme Maria Aparecida Moraes, une des auteurs du rapport : "Derrière la grandeur et le brillant de la production et de la productivité agricole se cache un monde du travail sali par la couleur de la souffrance, de la douleur, des menaces, de la peur, de l’irrespect des droits humains. C'est la permanence de l'intolérable."

Le couple de paysans Maria do Espírito Santo et José Cláudio Ribeiro da Silva, militants de l'environnement assassinés le 24 mai 2011