Les femmes burkinabé regagnent les marchés urbains en valorisant le karité

Expertise de terrain
Langue(s) : Français
Filières : Miel et autres produits forestiers
Pays : Burkina Faso

Le karité représente une ressource alimentaire ainsi qu’une source de revenus pour environ 1,5 million de femmes burkinabé, principalement en zone rurale. Mais si les femmes constituent la base sociale de la filière, ce sont elles qui bénéficient le moins de la vente des produits du karité. Pour qu’elles puissent conquérir une meilleure place dans la filière, le Gret (Groupe de Recherches et d'echanges Technologiques) développe depuis 2006 des projets visant à renforcer les capacités des productrices en termes de production, de transformation et de commercialisation. Azara Nfon Dibié est la coordinatrice du projet Beurre de karité.

Quelle est la place des femmes qui collectent les amandes de karité dans la filière karité ?

La collecte des noix concerne 45 % des ménages agricoles, soit au moins 1,5 million de femmes au Burkina. Environ 35 000  font partie de groupements de transformatrices, réunis en unions ou associations au niveau régional. Leur activité est principalement orientée vers l’exportation, un marché très restreint estimé entre 500 et 1 000 tonnes de beurre, alors que le marché national qu’elles peuvent potentiellement conquérir représente dix fois cela.

Travail du beurre de karité. © GRET

Le premier défi est donc de conquérir les marchés ruraux et urbains. Pour cela, l’idée est à la fois d’appuyer les femmes dans les activités de transformation et de conditionnement, pour mettre en valeur les amandes afin de créer de nouveaux débouchés, et d’inciter à la mutualisation des coûts et l’organisation entre groupements.

Pourquoi créer de nouveaux débouchés ?

Aujourd’hui, de nombreux produits issus de la valorisation des ressources naturelles des pays africains sont marginalisés sur leurs propres marchés intérieurs par la concurrence de produits importés, moins chers, mieux conditionnés, plus adaptés aux exigences des consommateurs urbains. C’est le cas du beurre de karité,  traditionnellement utilisé dans la cuisine, mais supplanté par d’autres huiles végétales sur les marchés urbains.  Il faut donc améliorer et diversifier l’offre de produits cosmétiques et alimentaires.

Aujourd’hui, où en sont les unions de productrices de karité que le projet a soutenues ?

Ces unions ont compris qu’il existe un marché en Afrique pour le beurre de karité, et que ce marché est prenable, pour peu qu’on y mette les moyens.  Un des groupements a réalisé un chiffre d’affaire d’1 million de FCFA pour 6 mois d’exercice et les femmes ont reçu en moyenne 20 000 FCFA par mois, quatre fois ce qu'elles gagnent d'habitude.

Comment expliquez-vous ces réussites ? Quelles sont les forces du projet ?

La connaissance des attentes des consommateurs a été essentielle. Et grâce aux efforts réalisés en termes de transformation et de conditionnement, nous avons peu à peu réussi à surmonter les réticences des distributeurs par rapport aux produits locaux, et mis en place un réseau de distribution qui garantit l’accès aux marchés urbains pour les produits des groupements de femmes. [...]

Salon International de l’Artisanat de Ouagadougou, 2012 © GRET

Propos recueillis le 28 août 2012 par Mathilde Leclerc et édités le 5 février 2014 par Gaëlle Le Gauyer

 

Pour creuser le sujet :

Fiche innovation, Comment vendre et promouvoir ses produits ,2004

Revue, Valoriser des produits locaux : face aux défis, une diversité de solutions , Inter-réseaux, Grain de sel n° 58, 2012

Étude, Les organisations paysannes innovent pour se positionner dans les chaînes de valeur agricole, 2011

Témoignage, Valoriser les produits locaux sur le marché, 2012

Témoignage, Consommer des produits locaux en Afrique de l’Ouest, 2011

 

Le projet a bénéficié d'un financement dans le cadre du programme « Promotion de l’agriculture familiale en Afrique de l’Ouest » (PAFAO, appel 2011). Le programme est porté par la Fondation de France et le CFSI, avec des contributions, de la Fondation Ensemble, de la Fondation L’OCCITANE et de l’Agence Française de DéveloppementLa SEED Foundation et la Fondation Un Monde par Tous participent au volet capitalisation du programme.